Retour sur les Universités des ruralités écologistes
Les 18, 19 et 20 octobre se tenaient les deuxièmes Universités des ruralités écologistes. Des écologistes ligériennes et ligériens, présent·e·s à Épinal, vous racontent tout !
Destination Épinal
Après Die, c’est à Épinal, commune de plus de 32 000 habitant·e·s, dans le département des Vosges que nous a donné rendez-vous la députée écologiste Marie Pochon. Cette deuxième édition a été organisée avec le groupe de travail ruralité et les élu·e·s écologistes du Conseil régional Grand Est.
Le postulat de départ n’a pas changé : « Changement climatique, installation agricole, services publics, accès aux soins & aux mobilités… Sur tous ces immenses défis, la conviction que l’écologie est la meilleure alliée des ruralités ». Plus de 400 personnes de toutes la France ont répondu à l'invitation car si de nombreuses initiatives existent, il est temps de poser davantage d’actes pour l’égalité de nos territoires.
La nouveauté de cette édition était un temps de formations proposé aux élu·e·s et aux membres et soutiens la journée du vendredi.
La soirée du vendredi a commencé avec un mot d’accueil républicain du maire d’Épinal, Patrick Nardin, où il est revenu sur la réalité difficile au niveau social et économique du territoire. Mais cela ne l’empêche pas de mener une politique alimentaire intéressante avec la mise en place d’une régie maraîchère communale et, au niveau de l’agglomération et de ses soixante-dix-huit communes, de développer une politique vélo avec la location longue durée de vélos à assistance électrique même si nous avons pu constater la grande place laissée à la voiture dans Épinal.
Lucie Castets, candidate au poste de Première Ministre du NFP est également venue débattre de la place et l’importance des services publics en milieu rural au côté de Michel Fournier, maire de Les Voivres, commune de 320 habitant·e·s à trente minutes d’Epinal et également président de l’association des maires ruraux de France. Il a notamment insisté sur la préoccupation première des territoires ruraux dans leur grande diversité, l’accès aux soins ! Marine Tondelier a quant à elle rappelé que les subventions publiques étaient en lien avec le nombre d'habitants ce qui défavorise le milieu rural : 33 % de la population mais 88 % du territoire.
Des ateliers divers et variés
Les ateliers se sont enchaînés sur l’alimentation, l’éducation populaire, les mobilités, la culture, la santé, la démocratie avec l’objectif toujours difficile à atteindre de sortir des constats et de partager les actions.
Sur l’alimentation, l’échange s’est construit autour de trois intervenant·e·s : un gérant de la Biocoop d’Épinal qui a fait le choix de s’installer dans le cœur de la ville, d’un gestionnaire de marchés dans les petites communes et d’un entrepreneur Fourgon qui œuvre au retour de la consigne. Il faut parfois faire plus de 600 kilomètres pour découvrir un acteur qui agit déjà dans l’Ouest. En 1980, 75 % des communes avaient au moins un commerce, En 2020, elles ne sont plus que 62 %. Les pôles commerciaux en périphérie ont capté 70 % de l'activité. Pour un citadin, il faut deux minutes à pied pour trouver un commerce, pour un rural, 5 minutes en voiture. Pour revitaliser les centre bourgs, les mairies disposent de quelques outils: taxe sur les locaux vacants après trois ans de vacances, action cœur de ville, préemption, mise en relation, tarification incitative et montrer l'exemple!
Au niveau agricole plusieurs sujets ont été abordés dont les propositions des assurances climat et dérèglement climatique, ce qui représente une aberration très onéreuse pour les deniers publiques car on ne s'attaque pas aux sources des problèmes. L'activité agricole participe à hauteur de 26 % au dérèglement climatique et pour changer il faut accompagner les agriculteurs.
Actuellement 80 % des fonds de la PAC vont à l'agriculture qui va droit dans le mur et qui utilise les pesticides. Les agriculteurs n'ont pas besoin d'aides mais d'une rémunération pour prendre soin de la terre et changer la manière de produire : le principe pollueur payeur ne fonctionne pas !
Sur la problématique de l'eau et des méga bassines, il a été rappelé que seuls 6 % des agriculteurs·rices irriguent. Il y a dix ans, l'eau de pluie mettait sept jours à rejoindre la mer, aujourd'hui elle met sept heures ! Il est donc primordial de restaurer le grand cycle de l'eau.
Nous avons également pu échanger sur les initiatives citoyennes européennes (ICE) et leur importance au niveau de l'Europe pour une victoire possible des citoyens : « l'initiative citoyenne européenne permet aux citoyens d'exprimer leurs préoccupations et de participer à l'élaboration des politiques de l’Union européenne (UE). Il s'agit d'un outil transnational pour améliorer le fonctionnement démocratique de l'UE ».
Éducation populaire, jeunesse et lutte contre l'extrême droite
L’éducation populaire dans les Vosges s'appuie sur 8 000 associations, 70 000 bénévoles et 9 750 salarié·e·s. C'est la 1re source d'emplois et la représentante de la Ligue pour l'Enseignement , Christine Devalois, regrette qu'on l'oublie souvent. Depuis 2005, les subventions aux associations ont diminué et les modalités d'appel à projets et de contractualisation avec les collectivités ont tendu les relations. Les Fédérations de l’éducation populaire doivent avoir leur propre projet politique, indispensable pour rester vigilants lorsqu'on est sous contrat pour la périscolaire, les crèches et donc responsables employeurs.
Emma Chevalier, secrétaire nationale des Jeunes Écologistes, explique la lutte contre la mise au pas de la jeunesse par le Service National Universel et les uniformes à l'école. Le débat porte ensuite sur la disparition progressive des colonies de vacances et sur la non-mixité sociale de celles qui perdurent avec des spécialisations (colo cheval, colo musique).
La montée de l'extrême-droite dans les territoires ruraux a évidemment occupé une place importante dans nos échanges du week-end. Les analyses de la Fondation de l’écologie politique ont notamment été instructifs à ce sujet. Le vote est principalement influencé par sa CSP, son genre, son niveau de diplôme, son revenu ou encore son type d'emploi. Autre point important, les services publics et les commerces sont des lieux de socialisation essentiels. Leur disparition nourrit le sentiment de solitude et l'impression de ne pas être entourés de gens de confiance.
Le RN utilise le « eux » contre « nous », il faut parler à tous les territoires en s'appuyant sur le « nous ». Pénibilité au travail, problème d'accès au logement, problème de pouvoir d'achat : c'est la France du « nous »
« Les données nous disent que la France n'est pas plus raciste qu'avant. C'est l'extrême-droite qui raconte une histoire de conflit entre ruraux et urbains, peuple et élites, Français·es et étranger·e·s. Il faut sortir de ce récit », détaille Cyrielle Chatelain.
Jeune en milieu rural : le diplôme représente une sécurité immatérielle or les inégalités d'accès aux lieux d'enseignement supérieur sont flagrantes. Lorsqu'on n'a pas de diplôme on surévalue la sécurité matérielle : maison, terres. Sans diplôme, on a moins d'autonomie au travail et c'est un des facteurs repérés du vote RN. Réinvestir des instituts d'enseignement en milieu rural.
À bientôt dans l'Ouest ?
Nous repartons d’Épinal avec l’envie d’organiser ces URE dans l’Ouest prochainement !
Merci à Alice, Yannick, Muriel, Lucie, Anne-Sophie, Henri-Claude et Michel pour leurs retours sur cet événement !
Pour aller plus loin
- L'Humanité, le 20 octobre : « Il existe un lien étroit entre les vécus et les ressentis des ruraux et des urbains » : à Epinal, la gauche se mobilise pour les campagnes
- Paris Match, le 20 octobre : À Épinal, Marine Tondelier danse la « Soyotte » et travaille pour conquérir les campagnes
- Reporterre, le 21 octobre : Face au RN, Les Écologistes veulent devenir « le premier parti des ruralités »
- Ci-dessous, dans Vosges TV :